[What Happened ?] Où est passé le rap made in New York ? [Dossier]


 

Depuis longtemps, je me pose cette question, depuis tellement d'années que j'ai arrêté de compter. Tellement longtemps que je ne me souviens même plus avoir cherché... jusqu’à il y a encore quelque temps. Si vous avez pour habitude de me lire, c'est à prendre ou à laisser, je l'ai déjà expliqué plusieurs fois, les recherches que j’effectue et les articles que je poste ne sont que mon avis. Je peux être extrêmement critique mais je reconnais la qualité quand elle est présente. Donc ne soyez pas étonné, si vous voyez vos artistes préférés se faire couper la tête et des artistes inconnus à vos yeux se faire encenser. 


Je suis de la vieille école, et comme dirait la Scred, je ne suis pas la tendance, il y a des "classiques" (en tous genres) auxquelles je n'adhère pas forcément. Ici, c'est l'avantage que vous aurez un avis tranché et bien ciblé sur certaines choses mais ce n'est qu'une passion, je fais ça par plaisir. Mon investissement, mon temps, mes connaissances, mes analyses... ont forcément une limite. Je suis ouvert au débat et aux échanges constructifs, je ne veux pas perdre mon temps à débattre si ce n'est pas un minimum argumenté. Ce qui me paraît logique étant donné que je le fais pour sûr mes commentaires.


Pour finir, je vous demande d’être indulgent et tolérant dans le sens c'est un dossier très complexe, sans fin et nouveau pour moi. Je n'ai pas vraiment trouvé d'article qui traite de cela. Donc je le fais. Si j'écris des choses, que je m'exprime sur d'autres c'est qu'à un moment, je ne me suis pas reconnus dedans ou que personne ne l'a fait avant. 

 

 

Le rap de New York, c'est quoi en fait ?

 

J'ai grandi avec le son des années 90', et j'étais le premier à faire la guerre aux autres coasts, pensant bêtement que la côte ouest = commercial, le sud = ne sait pas rapper proprement, le reste ? Connait pas. Je me suis totalement déconstruit de ces fausses représentations depuis bien longtemps. L'histoire est simple, j'ai très vite étais attiré vers le son mélancolique, Mobb Deep et le Queensbridge ont donc été ma porte d'entrée. Comme beaucoup d'ailleurs. 

 

 

 

Ceux qui inventent quelque chose ne sont pas forcément les meilleurs, du moins, ils ne le restent pas toujours. Et nous allons donc le vérifier. Bien que le rap soit né dans le Bronx au début des années 1970, il a vite migré vers les autres boroughs de la grande pomme. Le rap qui nous vient de New York (appelé plus souvent East Coast Rap) ne s'inspire de rien d'autre que de samples. Les beatmakers prennent un échantillon, une boucle, un passage ou autres d'un ou plusieurs morceaux de jazz ou soul en général. De là, ils font un morceau de rap, ensuite le rappeur donne le thème, son flow et ses textes font la différence. C'est plus souvent un rap cru, hardcore, engagé, poétique et qui porte un message. Si ce n'est pas la rue qui s'exprime, les ghettos crasseux qui rejettent leur fumée, c'est la voix des bas-fonds et des laissés-pour-compte. C'est aussi les blocs party, des histoires à dormir debout, des voyous qui se sont convertis en entrepreneur, un mouvement pro-noir... Bref, il y a tellement de choses mais surtout quelque chose de positif, quoi qu'on en dise.



Tout le monde s'accorde à dire que le golden âge, l'âge d'or du rap se situe environ entre 1992 / 1998, tout dépend. Je partage aussi cet avis concernant New York (pas la côte est), bien qu'on puisse pousser jusqu’à 2000 en vrai, et là le déclin commence sérieusement. Il faut s'entendre, nous avions beaucoup d'artistes au top de leur forme et leurs albums sont encore des références aujourd'hui : Big L, Nas, Jay-Z, Wu-Tang Clan, Mobb Deep, Jeru The Damja, Gangstarr, Talib Kweli, Big Pun, Notorious B.I.G, Pharaohe Monch, Rakim, Canibus, Capone-N-Noreaga... On peut y mettre tellement de monde ici. Donc on le voit, la qualité ne manquait pas, il y en avait trop même, certains qu'on découvre encore aujourd'hui tant la ville avait à nous présenter. À ce moment-là, personne ne pouvait rivaliser avec cette ville.


Je suis un grand fan de G-Funk, la période de 1992 à 1996 est mythique pour ce style de musique et c'est bien cela qui a ramené les projecteurs de ce côté-là des États-Unis (entre autres). Mais cela n'a pas duré et quoi qu'on en dise, l'école du micro n'est pas la même, la technique est clairement plus prononcée à l'est, les sabres sont plus aiguisés en regardant du coté du soleil levant. Après s'est approprié un son, une identité, une image, un mode de vie, d'avoir maximisé les profits et fait rayonner le rap dans le monde entier. La ville de New York a connu une chute vertigineuse, prévisible pour certains mais pas moins spectaculaires tant il y avait de la matière. Sans citer de noms, on peut commencer par dire que pas mal d'artistes ont proposé un second album de moins bonne qualité (beaucoup trop parfois) que le précédent opus. D'autres ont complètement disparu, d'autres ont persisté mais n'avaient plus ce qu'il fallait pour continuer et la relève a trop tardé à montrer le bout de son nez.

 

 

 

Peut-on rester bloquer dans le passé ?


Certains vont dire que j'en demande trop, d'autres que je ne m'intéresse pas assez à la scène de New York, d'autres encore qu'il faut se contenter de ce que l'on possède ! Si j'ai revu mon jugement, et je ne vais plus m'aventurer à dire "New York est mort", je peux clairement dire que la donne à changer et à plusieurs niveaux. Revenons avant d'aller plus loin sur un album qui a fait beaucoup de bruit, "Hip Hop Is Dead" de Nas en 2006. Et puisque je parle de lui, il me semble opportun de le citer : 

"Quand je dis que le hip-hop est mort, c'est la musique qui est morte, notre manière de penser est morte, notre commerce est mort...".

"Le hip-hop est mort parce que, nous, les artistes n'avons plus le pouvoir".

Et on ne peut que lui donner raison, bien que ça lui ait valu beaucoup de critiques (à juste titre) de la part des artistes du sud. Il dit la vérité. Le son de New York a évolué, il le fallait quelque part de toute façon, mais la différence notable est la passation des pouvoirs. Ce n'est plus la grande pomme qui inspire mais plutôt elle qui s'inspire des autres. Les artistes ont donc façonner leurs musiques pour qu'elles sonnent comme celle que font les autres artistes des États Unis. Le pari est osé, certains ont réussi mais pas tous, on pense forcément rapidement à A$AP Rocky. Bien des artistes dans le rap ont fait évoluer le genre tel que Outkast, Kanye West, Dr. Dre, Timbaland, Lil'Jon, Three 6 Mafia, Eminem... mais ils ont tiré la corde vers le haut et ne lui ont pas donné une direction dénuée de sens.





L'autre chose aussi qui a diablement changé est le pouvoir, qui le possède aujourd'hui ? L'industrie et les labels ont le monopole, mais un acteur important est apparu : les réseaux sociaux. Avec leurs chiffres, ils peuvent vous faire croire ce qu'ils veulent. Ce n'est pas par ce que certains artistes placent un son ou deux, un album qui fait du bruit, qu'on peut dire que telle ou telle ville domine. Il n'y a plus autant d’identité et d'identification variés comme aujourd'hui, on est loin de ce qu'on a pu connaitre. Il est évident que les schémas de rimes ont évolué, la façon de rapper, de raconter les histoires, les moyens de distributions, les accès à la musique et autres ont évolué. Mais pourquoi la qualité doit-elle en pâtir ? Aujourd'hui, si on résume rapidement, les labels tiennent les artistes, ils se plient à la demande du label pour faire un maximum d'argent, pas de la bonne musique. Plus besoin d'écrire des textes intelligents, personne n'écoute, et plus c'est long et complexe à retenir, plus on s'en lasse. Il faut des rimes faciles, une musique facilement reconnaissable qui pourrait aisément faire votre sonnerie et que cela soit joué en boucle et soutenu par les réseaux sociaux et le marketing. De plus aujourd'hui tout est permis, du style vestimentaire à la provocation qui vise un buzz sans réel projet...

 

 

 

Alors, on peut dire que je suis conservateur, faux. Que je suis nostalgique, que je me suis arrêté de vivre à une période et je me suis focalisé dessus, faux. J'ai des préjugés et une psychologie orientée, c'est déjà plus plausible, mais est-ce que je laisse cela en suspens ? La meilleure réponse est l’activité sur mon blog et la découverte permanente de nouveaux talents. Il est évident que je me suis accroché à mes classiques et mes acquis qui sont inévitablement devenu mes références, mais je n'ai pas raté le train pour autant. Certes, j'ai mis du temps à le prendre, mais je n'ai jamais trouvé mon siège, donc je préfère rester debout. Mais tout ceci s'explique aussi par le fait que la musique mainstream, ce qui passe actuellement n'est pas destiné aux anciennes générations ou aux architectes. Elle est destinée aux jeunes, aux générations à venir et à ceux qui n'ont pas encore bien ciblé leurs choix personnels. Si j'étais né dans cette nouvelle génération, je glorifierais peut-être le rap d'aujourd'hui. Mais je me rassure quand je parle avec des jeunes et qui ne se retrouvent pas non plus dans les textes actuels. Je pense à certains artistes qui avaient de telles paroles, on croirait entendre notre grand frère.

 

Forcément aujourd'hui, un mec qui a grandi avec du son trap, drill ou autres va le prendre comme argent comptant. Et cela sera sa définition du rap, et le vrai rap et ses classiques se feront en partie à travers cela. Et comme je l'ai dit, on parle de New York, donc on ne peut que regretter certaines choses, et si on cherche, on trouve, car il y en a des mecs bons. Il y en a des artistes qui avaient tant à offrir et qui ont disparu sans jamais confirmer ou noyer dans la masse. J'en parlerai dans mes futurs articles. Il est évident que l'attention n'est plus du tout tourné vers New York, qui depuis 50 Cent a réellement explosé ? Je ne suis pas fan de l'artiste mais il y a des morceaux à souligner. On peut y ajouter Cam'Ron aussi dans le genre.


New York a du talent, en a toujours eu mais les projecteurs sont ailleurs. Pourquoi ? Bonne question. Je dirais qu'il y a d'une part moins de talent que dans les grandes années et d'autre part que le son que la ville propose ne fait plus l'unanimité. D'autre part, il n'y a pas un "king" comme certains ont toujours prétendu l’être ou ont leurs attribués une couronne virtuelle (Nas, Jay-Z, Notorious B.I.G....). Et mine de rien, ça peut rallier, fédérer, amener de la concurrence et faire du buzz. Les anciens ont tenté des comme back ou se sont associés et ça n'a pas donné grand-chose en vrai. Clairement, on peut dire que le hip-hop new-yorkais n'est plus que l'ombre de lui-même. Avant, on pouvait aller dans n'importe quel quartier de New York, on avait un mec qui pouvait rimer comme personne. Aujourd'hui ? C'est peut-être le cas, mais la visibilité et l'effet de copie et de ressemblance est tellement présente qu'il est dur de savoir. Je ne doute pas de la capacité de cette ville à construire et créer, c'est surement l'un des endroits qui vivent au mieux le hip-hop à travers tous ses arts. Néanmoins, le manque d'attention de la part de l'industrie, la concurrence et le manque de visibilité placent un voile trop important sur cette immense mégalopole. 



A suivre...


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