[Chronique Son] Shurik'n - La Lettre

Écrit et produit par Shurik'n en 1998, il demeure le morceau le plus célèbre de l'artiste avec Samouraï. Ces deux morceaux ont reçus un tas d'éloges, 20 ans plus tard, ils sont toujours la. Je pourrai arrêter mon article a ca : "Ici, Shurik'n nous présente un grand père, exprimant ses adieux à son petit-fils à travers une lettre… Il s'agit d'un testament ; non pas un testament de biens, mais un testament de valeurs et d’éthique, expliquant que la vie est tout sauf facile, mais qu'on peut compter sur l'amour de ses proches pour s'en sortir…" Mais je vais quand meme écrire quelques lignes a mon tour sur ce morceau.

Ce testament il le commence dès le début en se plaçant dans la place de ce grand-père. La phrase :
"Un peu avant qu't'arrives mais j'pouvais pas rester le taxi attendait"

C'est en fait une métaphore, le taxi représente la mort, et personne n'a de pouvoir sur elle. Il a du mal a s'exprimer a travers cette lettre car beaucoup de choses a dire mais aussi beaucoup d'émotions. Mais il doit se lancer, et le fait pour livrer ce magnifique testament. Il a détourné un dicton qui dit "Quand on veut, on peut" en expliquant au petit, que dans la vie on a pas toujours le choix. Bien que le message est positif, il le met en garde car le contexte est a prendre en compte : entourage, milieu social, argent...Tout ceci peut limiter nos ressources et briser notre volonté. Mais lui pour son fils (donc le père du petit a qui il écrit), il a tout fait pour le mettre a l'abri. Il lui a enseigné une chose importante : la valeur de l'argent. Car c'était dur a gagner et ca l'est encore, faut pas négliger ca. La phrase peut avoir deux sens : " Le mien s'est tué au boulot" :

Sens propre :
"Le père du grand-père que fait parler Shurik'N est décédé sur son lieu de travail : on peut imaginer qu'il avait un emploi physiquement épuisant, tel un travail dans les mines, la sidérurgie, le bâtiment…"

Sens figuré  :
"Mais cette phrase peut également être comprise dans le sens de “se tuer à la tâche” : il a beaucoup travaillé pour assurer des conditions de vie décentes pour sa famille."

Il met clairement en avant son enfance difficile, il a pas grandi dans une famille aisé. L'école était délaissée pour une grande partie des enfants, certains jouaient au foot, d'autre se shooter. En parlant de l'école, il insiste encore sur le fait de ne pas abandonner car c'est une voie de sortie. Ce passage ou il souligne l'amour et l'importance de la mère, est simple mais prenant :
"Pense à celle qui va se faire tant de soucis pour toi 
A chaque fois que tu sortiras 
Celle qui te bordera toutes les nuits 
Et les jours où tu seras en colère après elle repense s'y 
T'en auras jamais deux comme ça, retiens ça"

Il brise les stéréotypes en disant qu'un homme pleure, ils sont juste trop virils pour le montrer, ou tout simplement trop fière. Son petit fils est sa fierté, sa réussite contre la malchance, la vie, la pauvreté...Car il a su fonder une famille qui va continuer son héritage de génération en génération.

Le deuxième couplet est un sorte de réconfort quand il dit au petit qu'il n'est mal tombé malgré qu'il ne choisit pas sa famille. Il a quand meme des parents, un foyer, des repas tous les jours...

"Tu subiras un peu les vannes des potes plus à la mode 
Fais pas un flan à ta mère pour une paire de bottes"

"Il s'agit ici d'un regard critique envers le matérialisme et l'envie : il ne faut pas succomber au diktat de l'apparence, qui en aucun cas ne détermine la personnalité d'un individu."

Il souligne aussi les violences auxquelles il devra faire face, mais c'est les lois de la vie, lui aussi est passé par la. On sait très bien que les insultes ne sont que des mots en l'air, mais on s'est tous battu pour ca et lui aussi passera par la. Son père lui apprendra plusieurs choses, dont ne pas avoir peur de la nuit et de l'obscurité, qui pourrait signifier par extension les moments difficiles. Par contre concernant les sentiments, il ne lui dira rien, par fierté, par orgueil, il ne dira pas je t'aime. Entre homme, il faut se comprendre, faut le deviner. Ca ne signifie pas qu'il n'a pas de sentiment, loin de la. Il ne faut pas blâmer les parents non plus quand on a pas ce qu'on veut, surtout par rapport a l'argent. Rien n'est acquis. Pour finir le morceau, il lui dit qu'il regrette vraiment de ne pas pouvoir le voir grandir mais il n'a pas le choix. Il sera toujours connecté a lui et toujours la pour lui spirituellement.
Un chef d’œuvre du maitre Shu. Une belle leçon de moral et d'écriture.