L'impact du rap en France [Dossier]


Red Bull en collaboration avec la SACEM viennent de publier un dossier nommé "L'impact du rap en France". C'est ce dossier au format PDF, long de 51 pages que je vais commenter et reprendre ici. L’introduction du dossier nous dit ceci :

"Le rap et ses différentes déclinaisons, la trap, la drill… est aujourd’hui le genre musical le plus écouté en France. Mais, malgré son succès, notamment auprès de plus jeunes, le rap est pourtant encore peu présent dans les médias ou dans les festivals… Cette étude cherche à analyser et comprendre les modes d’écoute et de consommation de cette musique ainsi que les éléments forts de cette culture. En sortie de crise sanitaire, nous espérons ainsi mieux dessiner le monde du rap de demain."

 

Le dossier s'intéresse en tout premier au marché de la musique en termes de ventes et de chiffres. Elle met en avant les ventes numériques et physiques, ces dernières s'effacent au profit des autres. 

 

- Analyse chiffrée et évolution récente  


En 2020, le revenu global de 658 m€ se décompose : 

Numérique = 474 m€ (72%) 

Physique = 184 m€ (28%)

"Les musiques urbaines : rap, hip-hop, RnB… toujours en pleine lumière. Ces répertoires, déjà très présents dans les années 90, reviennent en force avec l’essor du streaming et l’accès à la musique plus facile pour le jeune public. Ils font l’objet d’une consommation intensive, les jeunes écoutent les titres en boucle, d’où l’omniprésence de ces répertoires à la tête des classements."

 

Que disent les chiffres ? Voyons le nombre d'albums hip-hop dans le top 20 albums :

- 2017 : 9 albums / Album hip-hop le mieux placé : Soprano - L'Everest

- 2018 : 11 albums / Album hip-hop le mieux placé : Maître Gims - Ceinture Noire

- 2019 : 9 albums / Album hip-hop le mieux placé : Nekfeu - Les Étoiles Vagabondes

- 2020 : 11 albums / Album hip-hop le mieux placé : Ninho - M.I.L.S 3.0

 


 

 

- Urbain et Streaming : deux phénomènes intimement liés

 

"En 2019, la contribution au revenu annuel du streaming pour les trois majors (Warner Music, Universal Music et Sony Music) est concentrée sur 3 plateformes audio : Deezer (33 %), Spotify (27 %) et Apple Music (13 %). Première plateforme de streaming musical en volume, YouTube ne génère pour les 3 majors que 4 % des revenus du streaming pour l’année 2019."

La musique urbaine fait 87% de son chiffre en streaming, 12% en physique. Devançant ainsi tous les autres styles, le style Électro / Dance fait 78% en streaming. Le physique a encore de baux jours devant lui avec la Variété (80%) et la Pop (60%). Même le Rock semble céder puisque 63% de ses ventes sont numériques. Ses chiffres concernent l'année 2019. Les morceaux les plus joués en 2020 sur YouTube, Spotify, Deezer et Apple Music sont : 13 Oraganisé "Bande Organisé", Ninho "Lettre à une Femme" et  Gradur "Ne reviens pas". Il est très important de noter que ce classement ne veut quelque part pas dire grand chose, du moins, il n'est pas représentatif du rap comme on l'entend. En effet, il inclut des artistes tel que : Dadju, The Weeknd, Tones And I, Karol G, Soolking... Bien que j'ai du respect et que j'apprécie certains d'entre eux, on sort du cadre rap / hip hop et carrément "urbain" par moment. 

 

- Radios et Hip-Hop : un temps de retard

 

"Seulement 35 % de la génération née entre 1995 et 2004 écoutent la radio chaque jour, selon la  nouvelle enquête sur les pratiques culturelles
en France publiée par le ministère de la Culture ce mois-ci en juillet 2020."
Une stratégie de reconquête qui passe par le développement de marques numériques
Skyrock : Chaîne YouTube : 4,3 millions d’abonnés
Mouv’ : Chaîne YouTube : 598 000 abonnés + Projets podcasts Pod’Class avec les lycées.
Part des musiques urbaines parmi les 200 titres les plus écoutés :
Radios : 12 % (2016), 13 % (2017), 18 % (2018), 15 % (2019)
Streaming audio : 46 % (2016), 58 % (2017), 63 % (2018) 62 % (2019)
Streaming vidéo : 43 % (2016), 46 % (2017), 59 % (2018) 60 % (2019)"
 

J'anime moi-même l'émission radio Univers Hip Hop et c'est vrai que la tendance actuelle est plus du coté des podcasts. Cela comporte certains avantages, notamment le fait de pouvoir ré-écouter à outrance, de partager, de diffuser... Plus besoin de bloquer un créneau horaire comme on le ferait pour un événement sportif télévisé par exemple. La radio tout comme le format physique perd de plus en plus de monde au profit du streaming audio et vidéo comme nous venons de le voir. Tout évolue.

 

"Entre 2009 et 2019 le répertoire urbain dans le top 1000 triple en nombre de membres quand les revenus générés correspondants augmentent deux fois plus vite (x6). En 10 ans, ce répertoire est donc non seulement devenu plus important en taille, mais ses membres sont individuellement deux fois mieux rémunérés."

 

Ce qui signifie que les gros labels, les indépendants, les artistes et tout l'arbre du rap s'est structuré et s'est équipé. Les négociations ouvrent sur de plus gros revenus et les contrats sont plus juteux. Il y a toujours autant de rap amateur et non déclaré à la SACEM (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique) et qui ne gagnent pas d'argent pour la diffusions de leur titres. Aujourd'hui, de plus en plus montent leur dossier SACEM et en plus, ils gagnent plus qu'avant. La musique urbaine gagne son pain principalement sur le marché "online" (38%), ce qui représente que 9% chez les autres styles de musique. Ce qui vient encore avancer que les auditeurs passent par internet, nouvelle façon de consommer de la musique. Il faut dire que 99% de la population française possède un téléphone et la majorité ont une connexion internet.

 

- Diffusions et revenus 


"Les gros festivals accordent une place de plus en plus importante au rap. Cette tendance initiée depuis 20 ans est particulièrement marquée ces dernières années même si les eurockeennes gardent une dominante rock, les Vieilles Charrues, Garorock et Solidays donnent une place prépondérante aux artistes rap."

 

Les 3 derniers festivals cités ont programmé de 51% à 71% d'artistes rap sur l'année 2019 ! C'est colossal. C'est le style le plus représenté. 

 

"65 420 représentations de musique actuelles générent un total de 28,7 millions d’entrées pour un revenu billetterie de 930 m€. 1 spectacle accueille en moyenne 439 spectateurs pour un prix du billet moyen de 35 €

 

Point d’attention : Pas de « famille » dédiée hip-hop mais globalisée avec reggae
Rap, hip-hop, reggae et assimilés, plus forte hausse en fréquentation et en billetterie Les 2 774 représentations payantes de ce genre (4 % du total) ont réuni en 2017 2,8 millions d’entrées (10 % du total annuel) pour 74 m€ de billetterie (8 %).
Le rap, hip-hop, reggae est le genre qui présente la fréquentation moyenne par représentation la plus haute (1 016 entrées), en très forte hausse en 2017 du fait de la croissance des représentations proposées dans des lieux de très grande jauge.
14 représentations de ces esthétiques ont eu lieu à l’AccorHotels Arena en 2017 au lieu de 5 en 2016 dont Drake, IAM, PNL, Maître Gims, The Weeknd, Jul ; Black M s’est produit au Stade Parsemain de Fos-sur-Mer et Soprano à l’Orange Vélodrome de Marseille. Ce sont les tournées de Soprano, IAM, Black M, Tal, PNL et de l’Âge d’Or du Rap Français qui se distinguent nettement en 2017. Chiffre de 2017.
Fait notable en France : très peu de festivals uniquement dédiés au hip-hop avec les jeunes artistes francophones célébrés par la jeune génération."

 

 Le Hip-Hop et les jeunes en France : 


"Près d'1 jeune sur 2 écoute du hip-hop

Les villes les + Hip-Hop : Paris, Marseille, Lille, Toulouse, Lyon, Montreuil, Rennes

Les filles aiment autant le rap que les garçons.

86 % des - de 30 ans considèrent que le hip-hop n’est pas que de la musique 

85% d’entre eux l’associent à la danse 

72% d’entre eux l’associent au street art

95% des Français connaissent le hip-hop 

95% des - de 30 ans connaissent 

69% apprécient le Hip Hop"

 

- Sondages 

 


 

 

Nous avons réalisé 2 sondages pour cette étude :
• un sondage sur un panel de 1713 auditeurs
• un sondage sur une cinquantaine de professionnels du secteur
"Le Rap français et plus généralement « le RnB, le Dancehall, la Trap, la Drill… » représentent le genre musical le plus écouté en France. Mais ce genre est encore mal, ou peu représenté. Ce sondage cherche à collecter des informations honnêtes et justes sur vos habitudes d’écoute de la musique Rap et sur ce qui vous plait dans cette culture. Le sondage ne vous prendra que 8 minutes. Vos réponses nous aideront à mieux dessiner le monde musical du rap après la crise sanitaire dans laquelle nous sommes depuis maintenant plus d’un an…Merci d’avance pour le temps que vous lui consacre."
 

Répartition des sondés : 

 

- Hommes : 60,1%

- Femmes : 39,3%

Âge :

- 14 / 17 ans : 10,7%

- 18 / 24 ans : 46,2%

- 25 / 34 ans : 31,5%

- 35 ans et  plus : 11,5%

70% D'entre eux ont déclaré écouté du rap depuis 10 ans ou plus. 20,8% écoute du rap depuis 5 ans. 31,2% l'ont découvert via la famille, 29% via des amis, 18,4% via la radio, 7% par la TV ou YouTube. Pour environ 73% d'entre eux, le rap occupe de 50 à 100% de leur taux d'écoute musical, pour 72% d'entre eux, ils écoutent du rap francophone. A la question "Que préférez-vous dans le rap ?", ils ont répondus ceci :

- Les instrus : 70% 

- Le flow : 54%

- Les effets de styles : 41,4%

- Le mood général du titre : 39,1%

- Les mélodies (toplines) : 37,2%

- Les punchlines : 35,5%

- Le thème des textes : 29,3%

- La Culture Rap : 25%

- Les prises de positions : 21,1%

 

Perso, les chiffres ne me choquent pas, le fait que les gens ne s'intéressent pas vraiment aux textes, à l'idéologie de l'artiste / du morceau... Cela explique également pourquoi le rap ne joue plus son rôle. Les artistes et les labels s'adaptent à l'audimat, où sont les artistes pour dénoncer la supercherie de toute cette pandémie ? Au moins une prise de position, hormis Akhénaton, IAM et Mysa ?!

Sans surprise, le moyen d'écoute est "plateformes de streaming dans vos propres playlists / bibliothèque" avec 76,8% des voix. Le format physique récolte seulement 5%. En ce qui concerne la façon de s'informer, c'est Instagram qui l'emporte avec 71,5% suivi de YouTube (58,6%), les amis (50,4%), plateformes de streaming (45,5%), Twitter (32,4%), sites spécialisés (27,7%)... Bon j'ai encore quelques lecteurs qui s'informent ici alors, faut croire. Instagram est logiquement le réseau le plus utilisé au quotidien (72%), Twitter (15%) et Facebook (6,8%) sont très loin derrière ! Les réseaux sociaux (35,8%) avec Instagram et Twitter sont ceux qui font découvrir le plus d'artistes. Les autres moyens sont le streaming, YouTube et les amis. Et le grand gagnant est Spotify avec 64,2% d'utilisateurs suivi par Deezer (21,4%) et Apple Music (11,7%). Avec 93,7% de personnes ayant un compte streaming, ce n'est donc pas prêt de s’arrêter.

En termes de vie hors du monde digital, c'est différent. 70,2% des personnes assistent à moins de 5 concerts par an. 19,4% à moins de 10. 54,8% pensent qu'il y a assez d'artistes rap programmés sur les festivals de musique en France. 59,7% assistent au moins à 1 festival de musique par an, 32,3 s'y rendent entre deux et quatre fois par an. 85,7% d'entre eux souhaite voir des artistes sur scène qu'ils ne connaissent pas. 

"Quel montant maximum êtes-vous prêts à dépenser pour découvrir sur scène un jeune artiste de rap que vous ne connaissez pas ?". Pour environ 60% d'entre eux, ils sont prêt à débourser entre 10 et 15€. Un peu plus de 23% sont prêt à mettre entre 20 et 23€. 76,4% préfèrent voir les artistes dans des petites salles (entre 100 et 750 de capacité). 42,3% optent pour festivals avec d’autre artistes non rap, 35% dans les grandes salles et 29% dans des festivals dédiés uniquement aux musiques urbaines. Fin de la section sondage.


 

 


- Interview 

Oumar Samaké : "Directeur des labels SPKTAQLR et Golden Eye Music, producteur et manager de Lacrim, Dosseh, Dinos, Marie Plassard, Kounta et la VV, Oumar Samaké évolue et influence le monde de la musique en France depuis bientôt 20 ans. Il a fait ses armes au sein du Label Première Classe dans les années 2000. Il a été Directeur artistique chez Def Jam France pour Universal Music durant cinq ans. Il s’est tour à tour occupé d’artistes de renom a produit et réalisé de nombreux projets musicaux." 
Je vous propose des extraits de son interview :

"Depuis cinq ou six ans, l’intérêt du public et même des médias pour cette musique est en réelle croissance. Les rappeurs eux-mêmes ont évolué et se sentent plus libres. Ils ne sont plus uniquement préoccupés par ce qu’on appelait la « street crédibilité ». Ils osent plus de choses musicalement. Le rap, dans le fond ce n’est qu’une discipline, une manière d’interpréter un texte. On peut faire du rap qui parle d’amour, d’amitié, de travail ou de n’importe quel sujet. Aujourd’hui on a pris conscience que le rap est une forme et que le fond n’est pas obligatoirement contestataire. Longtemps le rap se devait d’être une musique qui dénonce, ce n’est plus uniquement le cas aujourd’hui"
Lors des défilés de mode à Paris, dans notre ville, Vuitton invite tous les Américains au premier rang, mais jamais un Français. Les Américains peuvent avoir des textes beaucoup plus vulgaires et violents que les nôtres, cela ne leur pose aucun problème. Adidas, une marque allemande, travaille avec des rappeurs français, Nike qui est une marque américaine aussi, en revanche Vuitton et la plupart des autres marques de luxes non… Yves Saint-Laurent travaille aussi avec le rappeur américain Travis Scott, mais pour la France ils choisissent l’actrice Charlotte Gainsbourg. Pourquoi pas un rappeur français ? Les marques françaises du luxe nous snobent. Je trouve cela très douloureux.
Cette musique n’est pas aimée par ce pays, les institutions, les professionnels, les médias, les marques… Même les rappeurs qui ont le plus gros succès souffrent d’une sorte de mépris général. Il faut simplement qu’on leur dise bravo. Même avec de l’argent ils se sentent souvent comme des merdes."
 
Éric Bellamy "Directeur général de la société de production de concerts Yuma Productions, pionnière dans l’univers du rap et organisant les tournées d’artistes aussi importants qu’Aya Nakamura, Black M, Damso ou Dinos, Éric Bellamy, qui a débuté sa carrière en 1998 au sein de la Lyonnaise des flows, est un fin connaisseur de l’univers rap ainsi qu’un des acteurs essentiels de ce milieu."

"Il y a des festivals pour tous les styles de musique, mais rien pour le rap, en dehors de quelques rendez-vous associatifs qui n’ont pas assez de moyens. C’est peut-être parce que la plupart des festivals en France programment maintenant des têtes d’affiche rap et comme ils souhaitent systématiquement des exclusivités régionales en échange de gros cachets, cela complique la naissance d’un festival 100 % urbain qui serait pourtant souhaitable. Pourtant, on peut se demander si le public a vraiment envie de voir tous les artistes de rap réuni sur une seule scène ou s’il n’est pas suffisamment heureux avec les soirées dédiées des festivals généralistes. Ce genre de festival existe néanmoins à l’étranger. Cela manque en France. En revanche, à mon sens, un tel festival ne peut avoir de sens que s’il présente aussi la scène internationale, pas uniquement française. Ce serait une fausse bonne idée de consacrer un festival entier au rap franco-français. Il faut élargir et être sur des jauges importantes. C’est en tout cas un projet sur lequel je travaille. Mais il faut réussir à convaincre des financiers. Ce n’est pas simple, car dans l’univers du live, les risques et les coûts sont énormes."
Ces rappeurs qui cherchent à nourrir la machine en publiant en permanence des nouveautés s’essoufflent rapidement. Le son des productions est de plus en plus formaté, de moins en moins original, tout le monde copie les mêmes schémas de production sans prendre de risque artistique. On maîtrise le chant ou l’autotune aussi bien que les Anglo-saxons, mais notre son a perdu en originalité. Les carrières sont aussi de plus en plus courtes.Il devient compliqué pour les artistes de durer et de traverser les époques et les tendances. Il y a de plus en plus de jeunes.
Je trouve qu’il manque de lieux, de médias et de moyens pour faire découvrir sa musique sans être obligé d’en passer par les algorithmes de YouTube/Facebook et des réseaux sociaux. Je regrette que les radios ne jouent plus assez leur rôle de défricheur. Le patron de Skyrock ne s’en cache pas, il calque sa programmation sur ce qui marche déjà en stream. On est piégé dans le carcan des algorithmes. Il manque des émissions spécialisées aux heures de grande écoute, des rendez-vous nationaux de qualité qui ferait un travail érudit sur le rap. Il faut des médias qui prennent des risques artistiques. Une cérémonie de remise de prix qui témoigne de la diversité et de la qualité de la scène urbaines bien mieux que ne le font les Victoires de la musique, qui ne se sont jamais ouvertes au rap, serait une bonne chose si cette cérémonie était véritablement prestigieuse, organisée par des connaisseurs et diffusée à une heure de grande écoute par un média d’importance. Tout indique malheureusement que la télévision a encore très peur du rap. Ils ne sont pas prêts à soutenir cette scène."
 
Alexandre Mahout "Directeur du Développement et des Répertoires, à la Direction des Relations Sociétaire de la SACEM."

"La Sacem est la société des auteurs, des compositeurs -et donc des beatmakers et des topliners- et des éditeurs de musique. Beaucoup l’ignorent, mais la Sacem compte également parmi ses membres des réalisateurs, des humoristes, des doubleurs, des sous-titreurs et des poètes. C’est une société à but non lucratif qui compte plus de 176 000 membres issus de 168 nationalités, qui, si l’on devait résumer son fonctionnement en une phrase, l’ont choisie pour protéger leurs oeuvres d’une seule voix et défendre leurs intérêts dans le monde entier.
La Sacem, en réalité c’est une coopérative d’auteurs, de compositeurs et d’éditeurs !
Sa mission essentielle est de collecter les droits d’auteur auprès de toutes les plateformes musicales (Deezer, Spotify etc.) mais aussi auprès de ses clients utilisateurs de musique (télévisions, radios, boutiques, hôtels, cafés, restaurants…) sur l’ensemble du territoire grâce à une soixantaine d’antennes locales.

 

Ces droits sont ensuite répartis aux auteurs, compositeurs et éditeurs dont les oeuvres ont été diffusées ou reproduites. La Sacem collecte et répartit les droits d’auteurs depuis 170 ans, ce qui en fait une société de gestion de droits d’auteur référente et leader au niveau mondial. Parallèlement à cette mission historique de collecte et de répartition, la Sacem a développé une offre de services à destination de ses membres pour les accompagner et les aider tout au long de leur carrière. Mais la Sacem c’est aussi un acteur culturel essentiel à la création grâce à sa politique d’action culturelle, qui permet chaque année à des milliers de projets de voir le jour.
Il faut savoir qu’avec le marché physique, les revenus étaient générés au moment de l’achat d’un CD, peu importe le nombre de fois qu’il était écouté. Avec le marché online, le calcul est différent. Les droits d’une oeuvre musicale dépendent du nombre de fois qu’elle a été écoutée. Et dans ce système ce sont souvent les répertoires qui ont une audience plus jeune (qui écoute un plus gros volume de musique dans la journée) qui ont les plus gros scores.
Pour être concret, si vous faites 10 millions de streams avec votre morceau et que (parce que vous avez mis du temps à votre mettre d’accord) vous ne le déposez qu’au bout de 18 mois, les revenus générés seront perdus ! Je ne peux que conseiller à nos membres de se mettre d’accord et de déposer leurs oeuvres dès qu’ils le peuvent. Nos équipes sont à leur disposition pour les accompagner et les conseiller durant cette étape ô combien essentielle.
Parmi ces nombreuses aides, la Sacem propose une aide à l’autoproduction permettant de financer et d’accompagner la sortie d’un projet musical. Nous recevons de nombreuses demandes d’aide pour des projets de musique urbaine."

Narjes Bahhar, responsable éditoriale du rap chez Deezer, Narjes Bahhar est au coeur de la révolution streaming et de la suprématie du rap.

"Depuis environ une quinzaine d’années, le rap français a pris pleinement l’espace : il y a beaucoup moins d’engouement pour le rap américain, même si les très grosses sorties US intéressent toujours le public rap. Par contre pour le reste, cela concerne un public très spécialisé. Le rap international ce n’est plus ce qui domine aujourd’hui en France, alors que c’était le cas dans les années 90.

Par ailleurs, dans la scène rap locale, il existe beaucoup d’hybridations musicales liées à l’immigration. À l’image de l’afro-rap qui est tellement présent dans le rap français. Dans la plupart des gros albums de rap français, et chez des artistes comme Ninho, Niska et même Booba, on a des titres avec ces sonorités. Et c’est la même chose avec les sonorités orientales. Il y a donc une musique ancrée dans les mouvements de l’histoire de France. Et puis il y a des spécificités territoriales. Comme la scène marseillaise. Depuis le premier album de Jul et l’important Pochon Bleu de Naps, un son de Marseille a été forgé par de nombreux acteurs. On peut citer : SCH, Soso Maness, Elams. On les retrouve sur l’album 13 Organisé qui a marqué l’assise et donné une impulsion à la scène Marseillaise. Pour le moment, il n’y a pas d’exemple aussi fort en France, mais on sent qu’il peut aussi émerger des scènes du côté de Lyon et de Lille.
C’est difficile de savoir comment les artistes gagnent de l’argent. C’est vraiment du cas par cas, en fonction de chaque artiste et du contrat qui être signé. Certains vont être signés uniquement en distribution, d’autres en licence, d’autres encore auront des contrats d’artistes.
 Un rappeur comme Hugo TSR par exemple est considéré comme confidentiel, mais il possède une communauté fidèle qui le suit. Ce sont des artistes qui sortent des disques très attendus et qui ne sont pas dans une stratégie de communication incroyable.
Il est nécessaire de structurer le rap français afin de créer un lobby et un cercle de réflexion sur les dynamiques économiques. C’est important aussi d’avoir une cérémonie comme Les Victoires de la Musique du Rap pour pouvoir célébrer cette musique bien sûr, mais surtout pour avoir une meilleure visibilité sur l’importance de ce qu’elle représente dans notre pays. Au niveau des festivals, je ne crois pas que l’on soit en manque. En France, la plupart des festivals historiques qui étaient très rock sont devenus très rap, parce que le rap est un business. Quand on observe Rock en Seine ou les Francos de La Rochelle, il y a beaucoup de rap en tête d’affiche."

 

- Synthèse


 

"Le marché de la musique bascule depuis dix ans vers le numérique. Dans ce contexte la part que représentent les musiques urbaines dans le CA de la musique enregistré NE CESSE DE CROÎTRE, au point de représenter depuis 2017 LA MOITIÉ DES 20 MEILLEURES VENTES D’ALBUM.

En 2020 les musiques urbaines représentent même 56% DU TOP DES VENTES D’ALBUM et 62% DES 200 TITRES LES PLUS ÉCOUTÉS EN STREAMING. 

En 2019, les musiques urbaines ne représentaient en revanche que 15% des 200 titres les plus joués en radio (chiffres radio en attente d’actualisation). D’après notre échantillon de 1713 personnes, 

• 73% des sondés déclarent écouter principalement DU RAP FRANCOPHONE (vs rap US) et cela monte à 78% sur la tranche 14-24 ANS. 

• 60% des sondés ont DÉCOUVERT LE RAP GRÂCE À LEURS AMIS ou LEUR FAMILLE et 18% grâce à la radio. Les principales raisons de L’INTÉRÊT POUR LE RAP sont « LES INSTRUS » (70%) puis « LE FLOW » (54%).

• 85% des sondés utilisent LES PLATEFORMES DE STREAMING pour écouter du rap et 12% YouTube. Le format physique ne représente que 3%.

• 71% des sondés s’informent à travers INSTAGRAM (79% pour la tranche 14-24 ans), 58% sur YouTube et 50% grâce à leurs AMIS. 

D’après notre échantillon, la source de DÉCOUVERTE DE NOUVEAUX ARTISTES se décompose comme suis 36% RÉSEAUX SOCIAUX (dont 74% d’utilisateur d’Instagram), 25% PLATEFORME DE STREAMING, 16% YOUTUBE et 12% AMIS. 

• 86% des sondés ont envie de DÉCOUVRIR DES ARTISTES DE RAP SUR SCÈNE qu’ils ne connaissent pas encore, 76% voudraient les voir dans des petites salles et 59% des sondés sont prêt à dépenser 15 euros pour cela. 

Parmi la CINQUANTAINE DE PROFESSIONNELS du rap (directeur artistique, agent...) qui ont été interrogés, 86% considèrent que le marché des musiques urbaines est en PROGRESSION CONSTANTE et 46% considèrent que la création d’une cérémonie de remise de PRIX DES MUSIQUES URBAINES pourrait aider à un MEILLEUR DÉVELOPPEMENT du rap en France."


Il y a des trucs je suis d'accord mais c'est trop "urbain" pour moi. J'entends que le rap a évolué mais on ne peut mélanger pop urbaine et rap comme on l'entend... Ça s'est démocratisé et ça touche plus de sphères mais à quel prix ? Underground will live forever baby...

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